~ Histoire d'Espagne ~

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114 - L'Installation du Régime de Franco -

Abstraction faite de l'aide allemande et italienne, les troupes nationalises l'ont emporté grâce à une conjonction de forces hétérogènes : l'armée, elle-même politiquement divisée, la Phalange, d'inspiration fasciste, les Carlistes, essentiellement catholiques et monarchistes, certains éléments venus du syndicalisme, et enfin, sauf au Pays Basque, le Clergé.

Vainqueur, Franco s'attache à prévenir les dissensions : l'État qu'il entend fonder "placé sous le double signe de la Croix et de l'Épée" sera à la fois national, catholique et social ; la bannière rouge et or redevient celle du pays. L'armée obtient de grands avantages et des généraux sont installés aux principaux postes de gouvernement. La Phalange est flattée, on lui reconnaît le droit d'encadrer le pays, et José Antonio Primo de Rivera, son fondateur fusillé par les républicains est promu au rang de héros national. Promesse est faite que le capitalisme sera freiné pour éviter l'oppression des salariés. L'Église, quoique surveillée de près, est l'objet des plus grands hommages, les prêtres recevant un traitement public et le catholicisme redevient religion d'État. Enfin, les Carlistes ont la satisfaction d'entendre proclamer que le régime d'Espagne est d'essence monarchique – le nom du souverain et l'époque de son avènement étant cependant prudemment laissés dans le vague...

Avant que tout ceci ne se mette en place, éclate la Seconde Guerre Mondiale et les affinités du régime comme le souvenir du concours reçu inclinent tout naturellement le gouvernement franquiste à se prononcer en faveur des Puissances de l'Axe ; il n'en affirme pas moins sa stricte neutralité, tout en profitant de la défaite de la France en juin 1940 pour dénoncer le statut international de Tanger et mettre la main sur la ville. Il entame avec l'Allemagne et l'Italie des conversations aux fins de s'approprier la totalité du Maroc, Gibraltar et l'Oranais, ce qui lui est promis comme prix de l'abandon de sa neutralité ; mais Franco, qui mesure l'état de délabrement de son pays, exige pour ce faire un ravitaillement immédiat ainsi qu'une aide économique permanente, marchandage dont se plaint Hitler sans y donner suite...

Lors d'une entrevue avec le Caudillo le 23 octobre 1940 à Hendaye, le Führer lui déclare que les troupes allemandes pénétreront dans la péninsule le 10 janvier suivant, pour marcher sur l'Afrique. Franco fait alors marche arrière, invoquant que cette action lui semble prématurée ; finalement, le concours de l'Espagne à la cause de l'Axe se bornera à l'adhésion au pacte anti-Komintern du 25 novembre 1936, et un peu plus tard, à l'envoi de la division bleue sur le front russe. Churchill rendra publiquement hommage au service rendu aux Alliés par le gouvernement espagnol en restant en marge de la guerre.

La complète victoire des puissances de l'Axe devenant improbable dès l'automne 1942, le gouvernement espagnol entreprend des tentatives de rapprochement avec l'Angleterre comme les États-Unis, rappelant par échelons la division bleue, entrouvrant ses prisons politiques, traitant moins durement les jeunes Français passant par les Pyrénées dans l'intention de rejoindre les Forces libres d'Afrique du Nord. Néanmoins, à la capitulation sans conditions de l'Allemagne nazie, l'Espagne franquiste se trouve en fâcheuse posture sur le plan international.

L'Union Soviétique et ses satellites, mais aussi la France, lui sont violemment hostiles ; le Gouvernement Provisoire de la République française du Général de Gaulle comprend des communistes et c'est en France que se trouve la majorité des réfugiés politiques qui ne laissent pas d'exercer une grosse influence, le gouvernement en exil, installé à Mexico, ne tardant pas à s'installer à Paris.

L'Espagne, contrainte d'abandonner Tanger, n'est pas admise au sein de l'Organisation des Nations Unies devant laquelle elle est mise en accusation ; des débats confus ne sort, en décembre 1946, qu'une recommandation de rupture de relations diplomatiques avec Madrid ; si timide qu'elle soit, cette ingérence blesse l'orgueil espagnol mais sert le régime franquiste.

Celui-ci tend à se normaliser ; une ébauche de Constitution donne naissance à un système à base de Cortès, dotées d'attributions consultatives ; une amnistie permet le retour de nombreux émigrés et une forme de parti unique, el movimiento, est fondé.

L'Espagne ne sort de son isolement diplomatique qu'au moment de la tension entre les Alliés occidentaux & l'Union Soviétique ; sa position géographique est telle qu'elle ne peut être ignorée dans un plan de défense du monde libre ; et cette "noche negra" prend réellement fin lorsque, par un accord conclu le 26 septembre 1953 avec les États-Unis, en contrepartie d'un droit d'installation des bases militaires sur son territoire, elle obtient une garantie formelle de sécurité ainsi que de très larges crédits, les uns remboursables, les autres à fonds perdus ; cette accord est reconduit le 26 septembre 1963, l'Espagne devenant alors associée au système de défense de l'OTAN.



14/04/2016

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