096 - L'Insurrection des Colonies Américaines -
Le déplorable règne de Ferdinand IV voit l'effondrement de l'Empire espagnol d'Amérique ; de l'absence de pouvoir des colons propriétaires à l'exemple de la rébellion des colons d'Amérique du Nord, des appels à la liberté lancés par les révolutionnaires français à la fondation de loges maçonniques, les colonies sont prêtes à accéder à leur indépendance. L'Angleterre a toujours considéré d'une œil jaloux les possessions espagnoles en Amérique ; en guerre contre l'Espagne, elle songe vite à lui porter des coups Outre-Atlantique ; en 1806, le débarquement à Buenos-Aires tourne court, mais Londres s'abouche avec plusieurs créoles pour, ne leur ménageant ni l'or ni les promesses, les inciter à fomenter l'insurrection ; le plus en vue de ces créoles est Francisco Miranda, militaire brillant qui fut, un court moment, commandant des armées françaises opérant aux Pays-Bas ; il fait une tentative de soulèvement dans son pays natal, le Venezuela, mais échoue, ses compatriotes étant en majorité de loyaux sujets de la Couronne espagnole.
Cependant, à partir de 1808 ce loyalisme est mis à rude épreuve : les Français sont entrés en Espagne, Charles IV a abdiqué, Ferdinand VII est prisonnier, Joseph Bonaparte est Roi d'Espagne... A qui doit-on obéissance ? Aucun des créoles n'accepte de se rallier au roi intrus et les moyens de communication avec la junte de Cadix sont précaires ; la tentation est grande d'en profiter pour s'administrer soi-même ; voyant le danger, en 1810 les Cortès de Cadix proclament les colonies américaines, partie intégrante du Royaume d'Espagne et proposent d'accueillir en leur sein 30 députés de ces territoires ; mais ce geste est sans effet. Miranda réapparaît au Venezuela, et si un congrès réuni à Caracas le proclame dictateur, il est cependant fait prisonnier par les troupes restées fidèles à l'Espagne. Son compatriote Simón Bolívar, ancien élève de l'école polytechnique en France, s'échappe et passe en Nouvelle-Grenade, future Colombie, d'où il organise la lutte pour l'indépendance. Ainsi en 1814, quand les troupes françaises sont boutées hors d'Espagne, Ferdinand VII prend possession de toutes les Colonies américaines, sauf du Pérou et du Mexique qui, d'une façon fort décousue, se sont affranchis de la suzeraineté métropolitaine.
Le Souverain et ses conseillers emploient la manière forte ; d'importantes forces sont envoyées sur place, les juntes locales défaites, leurs membres traqués et exécutés ; la brutalité de la répression renforce le désir des patriotes de couper tout lien avec la métropole ; ils constituent alors des bandes de partisans, encadrées par des officiers européens libérés des guerres napoléoniennes, auxquelles l'Angleterre prête un appui financier. La véritable indépendance peut alors se mettre en marche.
L'un des héros en est Simón Bolívar ; il part des Antilles anglaises, où il s'était réfugié, pour défaire à l'issue d'une campagne de 70 jours les troupes espagnoles occupant le Venezuela et la Nouvelle-Grenade. En 1819 il proclame l'indépendance et l'union de ces deux pays, auxquels se joindra bientôt l'Équateur, sous le nom de République de Grande Colombie.
Pendant ce temps, le général Juan José de San Martín, un créole de Rio de La Plata, après avoir victorieusement lutté contre les Espagnols, franchit avec 4 500 hommes et 9 000 mulets la redoutable chaîne des Andes pour investir le Chili ; il en chasse les forces régulières, rejoint le Pérou par mer en 1820, en soulève les habitants, s'empare de Lima, bastion de la puissance castillane, et fait de ce pays un état indépendant. Rejoint en 1822 par Bolívar qui rêve de réunir en une vaste fédération toutes les anciennes colonies espagnoles, San Martín, modeste libertador, s'incline devant le prestige du nouveau venu et se retire en France !
Le Paraguay s'est déjà déclaré indépendant et l'Uruguay s'est provisoirement donné au Brésil i.e. au Portugal ; la dernière armée espagnole est retranchée derrière la barrière andine, l'actuelle Bolivie ; en 1824, elle est écrasée à Ayacucho par les petites forces du général Antonio José Sucre, lieutenant de Bolívar.
En Nouvelle-Espagne, actuel Mexique, la sécession débute lorsque 2 curés, Miguel Hidalgo & José Maria Morelos, lèvent successivement l'étendard de la révolte ; tous deux sont pris et fusillés, mais un officier créole, le général Iturbide, parvient à débaucher la majeure partie des garnisons espagnoles pour se rendre maître des grandes villes et se faire acclamer Empereur du Mexique en 1822 sous le nom d'Augustin I° ; il est cependant renversé dès 1823 par un pronunciamento et le Mexique devient une république fédérale, avec une Constitution imitée de celle des État-Unis.
En même temps que le Mexique, les territoires de l'Amérique centrale se soulèvent pour se joindre à lui en 1823 et former 5 petites républiques, groupées en une fédération.
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